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CE, 20 décembre 2021, n° 454801 envois successifs de pièces dans une procédure de DSP

Conseil d'État, 20 décembre 2021, n° 454801 - Règles pour envois successifs de pièces dans une procédure de DSP

Inapplicabilité aux délégations de service public (DSP) de la règle des marchés publics issue de l'article R. 2151-6 du CCP selon laquelle seule la dernière offre transmise est examinée. Une simple mention dans le RC ne peut faire prévaloir systématiquement le dernier envoi. L'acheteur est tenu de vérifier si celui-ci constitue une nouvelle candidature complète ou un simple ajout sous peine d'irrégularité.

En matière de DSP, si un candidat transmet successivement plusieurs envois, l'autorité concédante doit examiner le contenu de chacun d'eux et ne peut rejeter une candidature comme incomplète en ne se fondant que sur le seul dernier envoi. Celui-ci ne saurait être regardé automatiquement comme une candidature complète se substituant à celle initialement déposée, s'il apparaît qu'il ne contient en réalité qu'un document complémentaire. Un simple renvoi dans le RC ne suffit pas à faire prévaloir systématiquement le dernier envoi, à la différence de la règle prévue pour les marchés publics par l'article R. 2151-6 du CCP.

En l'espèce, en rejetant la candidature de TDS au seul motif que le dernier envoi de celle-ci ne comportait qu'une licence IV, pourtant transmise en complément du dossier initialement déposé, sans examiner celui-ci, la commune a méconnu le principe de l'examen successif des différents envois en DSP. Son RC, en se bornant à renvoyer à un guide d'utilisation de la plateforme de dépôt, ne permettait pas d'écarter l'application de ce principe.  

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000044588613

La commune de Cavalaire-sur-Mer a lancé une procédure de délégation de service public pour l'exploitation de lots de plages. La société TDS a transmis sa candidature pour le lot n°10 le 11 mai 2021 puis une pièce complémentaire (sa licence d'exploitation IV) le 16 mai. La commune n'a tenu compte que du dernier envoi qu'elle a rejeté comme incomplet. Le juge des référés du TA de Toulon avait rejeté la demande de la société TDS d'enjoindre à la commune de réexaminer les offres.

Le Conseil d'État annule l'ordonnance et fait droit à la demande de la société requérante. Il juge que la commune ne pouvait pas, en se fondant sur l'article R. 2151-6 du code de la commande publique, considérer le dernier envoi comme la seule candidature de la société TDS et la rejeter comme incomplète (point 4). En effet, cet article, qui prévoit que "Si plusieurs offres sont successivement transmises par un même soumissionnaire, seule est ouverte la dernière offre reçue par l'acheteur dans le délai fixé pour la remise des offres", n'est pas applicable aux délégations de service public. De plus il n'a pas pour effet de considérer tout envoi successif comme une nouvelle offre se substituant à la précédente.

Le règlement de la consultation se contentait de renvoyer à un guide d'utilisation indiquant que le dernier envoi l'emporte. Mais cela "ne pouvait, en tout état de cause, dispenser l'autorité concédante de constater que la seconde transmission ne comportait qu'un document et ne pouvait être raisonnablement regardée comme se substituant au dossier de candidature transmis antérieurement" (point 4).

Le Conseil d'État en déduit que "la société TDS est fondée à soutenir qu'en rejetant sa candidature comme incomplète en ne tenant compte que de cette seconde transmission, la commune de Cavalaire-sur-Mer a manqué à ses obligations de mise en concurrence et que ce manquement l'a lésée".

Il enjoint donc à la commune "de reprendre la procédure au stade de l'examen des candidatures en tenant compte de la candidature que la société TDS lui a transmise le 11 mai 2021" (point 5).

[...]

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Toulon que la commune de Cavalaire-sur-Mer a engagé une procédure de passation d'une délégation de service public pour l'exploitation de 9 lots de plages, pour une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 2022. La date et l'heure limites pour le dépôt des candidatures par voie dématérialisée étaient fixées au 17 mai 2021 à 17 heures. La société TDS a transmis sa candidature à l'attribution du lot n° 10 le 11 mai 2021 puis a transmis le 16 mai 2021 une copie de sa licence d'exploitation IV. La commune a indiqué à la société TDS qu'elle avait bien reçu ses deux courriers mais qu'elle n'avait, en vertu de l'article R. 2151-6 du code de la commande publique, ouvert que le dernier d'entre eux, que la commission de délégation de service public avait rejeté comme constituant une candidature incomplète. Par une ordonnance du 5 juillet 2021 contre laquelle la société TDS se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à la commune de Cavalaire-sur-Mer de procéder à un nouvel examen et à un nouveau classement des offres reçues au titre du lot n° 10.

2. Pour rejeter la demande de la société TDS, l'auteur de l'ordonnance a estimé qu'elle n'était pas fondée à soutenir que la commune ne pouvait rejeter sa candidature comme incomplète sans consulter la copie de sauvegarde qu'elle avait également déposée. Il n'a pas répondu aux autres moyens de la demande, en particulier celui tiré de ce que la commune ne pouvait opposer une règle selon laquelle seul le dernier envoi était pris en compte, qui ne ressortait pas clairement du règlement de la consultation. Son ordonnance doit, par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, être annulée.

3. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

4. Il résulte de l'instruction que la société TDS avait successivement transmis sur le profil d'acheteur de la commune, dans les délais fixés par le règlement de la consultation, sa candidature et un pli comportant une pièce complémentaire. Se fondant sur l'article R. 2151-6 du code de la commande publique, aux termes duquel " Le soumissionnaire transmet son offre en une seule fois. Si plusieurs offres sont successivement transmises par un même soumissionnaire, seule est ouverte la dernière offre reçue par l'acheteur dans le délai fixé pour la remise des offres. ", la commune n'a tenu compte que de ce dernier pli et, le regardant comme constituant la seule candidature transmise par la société TDS, l'a rejetée comme incomplète. Or, d'une part, ces dispositions, outre qu'elles ne sont pas applicables à la passation des concessions, n'ont pas pour effet de conduire à regarder toute transmission comme une offre. D'autre part, le seul renvoi par le règlement de la consultation à un guide d'utilisation de la plateforme où devaient être déposées les offres sur lequel figurait la mention selon laquelle " Si vous devez modifier ou rajouter une pièce à votre réponse déjà déposée : tout déposer à nouveau et au complet car le dernier envoi prévaut !!! ", ne pouvait, en tout état de cause, dispenser l'autorité concédante de constater que la seconde transmission ne comportait qu'un document et ne pouvait être raisonnablement regardée comme se substituant au dossier de candidature transmis antérieurement. Par suite, la société TDS est fondée à soutenir qu'en rejetant sa candidature comme incomplète en ne tenant compte que de cette seconde transmission, la commune de Cavalaire-sur-Mer a manqué à ses obligations de mise en concurrence et que ce manquement l'a lésée.

5. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu, en application de l'article L. 551-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à la commune de Cavalaire-sur-Mer de reprendre la procédure au stade de l'examen des candidatures en tenant compte de la candidature que la société TDS lui a transmise le 11 mai 2021.

[...]

Actualités

Offres successives transmises par un même soumissionnaire : Le dernier pli reçu doit-il être systématiquement regardé comme une offre ? - 27 décembre 2021.

Dysfonctionnement de la plateforme et offre hors délai [offre hors délai]. - 30 septembre 2021.

Réponse électronique déposée hors délai et lien hypertexte défectueux alors qu’un autre lien est fonctionnel dans le règlement de la consultation. - 15 juin 2022.

Jurisprudence

TA Rouen, 13 septembre 2024, n° 2403392 (Irrégularité des offres d'entreprises liées. Implications pratiques de la notion d'opérateur économique unique pour les entreprises et les acheteurs publics. Un même soumissionnaire ne peut présenter qu'une seule offre pour chaque lot. Rejet du référé précontractuel d'une société dont l'offre avait été écartée d'un marché public de travaux. La requérante et une autre société candidate constituaient un opérateur économique unique en raison de leur absence d'autonomie commerciale, caractérisée par des moyens communs, des offres similaires et des liens structurels. Cette qualification a entraîné l'irrégularité des deux offres, justifiant leur rejet par le pouvoir adjudicateur. La décision précise ainsi les critères d'appréciation de l'opérateur économique unique et ses conséquences sur la régularité des offres dans les marchés publics, renforçant la sécurité juridique des procédures de passation).

MAJ 27/12/21 - Source Legifrance