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CE, 22 décembre 2023, n° 472699 - Devoir de conseil MOE OPH Domanys

Conseil d’Etat, 22 décembre 2023, n°472699, OPH Domanys - Mentionné dans les tables du recueil Lebon

Responsabilité du maître d’œuvre pour manquement à son devoir de conseil. Ce devoir de conseil implique que le maître d'œuvre signale au maître d'ouvrage toute non-conformité de l’ouvrage aux stipulations contractuelles, aux règles de l’art et aux normes qui lui sont applicables, afin que celui-ci puisse éventuellement ne pas prononcer la réception et décider des travaux nécessaires à la mise en conformité de l’ouvrage. 

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000048659358

Considérant ce qui suit :

[...]

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'office public de l'habitat (OPH) Domanys a confié la maîtrise d'œuvre de la construction d'un ensemble de quarante logements à Migennes (Yonne) à un groupement dont la société SIZ' IX Architectes, aux droits de laquelle vient la société Emmanuelle Andreani Architectes, était le mandataire. La réception de l'ouvrage a été prononcée avec réserves par des décisions des 2 novembre et 18 décembre 2015 et les dernières réserves ont été levées par décision du 2 novembre 2016. A l'issue d'un contrôle du respect des règles de construction effectué le 12 juillet 2016, le directeur départemental des territoires de l'Yonne a mis en demeure l'OPH Domanys de mettre les logements en conformité aux normes portant sur leur aération et leur accessibilité aux personnes handicapées. Les travaux permettant de remédier à ces non-conformités ont été effectués par la société Gebat Constructions, titulaire du marché de travaux, entre le 4 avril et le 9 juin 2017. Par un jugement du 2 juin 2020, le tribunal administratif de Dijon a fait droit à la demande de l'OPH Domanys tendant à la condamnation de la société SIZ'-IX Architectes à lui verser la somme de 80 482,06 euros hors taxes correspondant au coût de ces travaux de reprise. Par un arrêt du 2 février 2023, contre lequel l'OPH Domanys se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé ce jugement et rejeté ses conclusions.

2. La responsabilité des maîtres d'œuvre pour manquement à leur devoir de conseil peut être engagée dès lors qu'ils se sont abstenus d'appeler l'attention du maître d'ouvrage sur des désordres affectant l'ouvrage et dont ils pouvaient avoir connaissance, en sorte que la personne publique soit mise à même de ne pas réceptionner l'ouvrage ou d'assortir la réception de réserves. Ce devoir de conseil implique que le maître d'œuvre signale au maître d'ouvrage toute non-conformité de l'ouvrage aux stipulations contractuelles, aux règles de l'art et aux normes qui lui sont applicables, afin que celui-ci puisse éventuellement ne pas prononcer la réception et décider des travaux nécessaires à la mise en conformité de l'ouvrage.

3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Lyon a jugé que les non-conformités aux règles de construction des bâtiments d'habitation neufs relevées par la direction départementale des territoires de l'Yonne, mentionnées au point 1, n'auraient pas pu figurer au nombre des réserves assortissant la réception au motif qu'elles ne constituaient pas des non-conformités aux spécifications des marchés de travaux et qu'en admettant qu'elles relèvent d'erreurs de conception de l'ouvrage, leur signalement ne relevait pas de la mission d'assistance aux opérations de réception incombant au maître d'œuvre. Elle en a déduit que la responsabilité contractuelle de ce dernier pour manquement à son devoir de conseil à la réception ne pouvait être engagée pour ne pas les avoir signalées au maître d'ouvrage. En statuant ainsi, alors qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le devoir de conseil du maître d'œuvre impliquait que la société SIZ'-IX Architectes signale à l'OPH Domanys, lors des opérations de réception, toute non-conformité de l'ouvrage aux normes qui lui sont applicables, notamment aux prescriptions techniques en matière de construction relatives à l'aération des logements et à leur accessibilité aux personnes handicapées, afin que celui-ci puisse éventuellement ne pas prononcer la réception et décider des travaux nécessaires à leur mise en conformité, la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que l'OPH Domanys est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

[...]

MAJ 03/01/24 - Source legifrance

Jurisprudence

CE, 10 décembre 2020, n° 432783, Commune de Biache-Saint-Vaast (Impossibilité de rechercher la responsabilité contractuelle du maître d’œuvre après la réception des travaux en ce qui concerne les missions de conception de l’ouvrage. La responsabilité des maîtres d'oeuvre pour manquement à leur devoir de conseil peut être engagée, dès lors qu'ils se sont abstenus d'appeler l'attention du maître d'ouvrage sur des désordres affectant l'ouvrage et dont ils pouvaient avoir connaissance, en sorte que la personne publique soit mise à même de ne pas réceptionner l'ouvrage ou d'assortir la réception de réserves. Ce devoir de conseil implique que le maître d'oeuvre signale au maître d'ouvrage l'entrée en vigueur, au cours de l'exécution des travaux, de toute nouvelle réglementation applicable à l'ouvrage, afin que celui-ci puisse éventuellement ne pas prononcer la réception et décider des travaux nécessaires à la mise en conformité de l'ouvrage. Maître d'oeuvre s'étant abstenu de signaler au maître de l'ouvrage le contenu de nouvelles normes acoustiques et leur nécessaire impact sur le projet, et de l'alerter de la non-conformité d'une salle polyvalente à ces normes lors des opérations de réception alors qu'il en avait eu connaissance en cours de chantier. Engagement de sa responsabilité pour défaut de conseil).

CE, 2 décembre 2019, n° 423544, Société Guervilly et autres (Indépendamment de la décision du maître d'ouvrage de réceptionner les prestations de maîtrise d'oeuvre prévue par les stipulations de l'article 32 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés de prestations intellectuelles, la réception de l'ouvrage met fin aux rapports contractuels entre le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre en ce qui concerne les prestations indissociables de la réalisation de l'ouvrage, au nombre desquelles figurent, notamment, les missions de conception de cet ouvrage. Par suite, commet une erreur de droit la cour qui juge que le constat de la réception de l'ouvrage ne fait pas obstacle à ce que la responsabilité contractuelle des maîtres d'oeuvre soit recherchée à raison des fautes de conception qu'ils ont éventuellement commises).

CE, 19 novembre 2018, n° 413017, Société Travaux du Midi Var - Mentionné dans les tables du recueil Lebon (La responsabilité du maître d’œuvre dans le cadre de sa mission de surveillance de l’exécution du marché n’est pas subordonnée à l’existence d’une faute grave).

CE, 6 avril 2007, n° 264490, Centre hospitalier général de Boulogne-sur-Mer (La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve. Elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage. Seule l'intervention du décompte général et définitif du marché a pour conséquence d'interdire au maître de l'ouvrage toute réclamation à cet égard).

CE, 15 décembre 1965, n° 64753, Ministre de la construction c/ Société générale d'études techniques et industrielles et autres (Abstention fautive. Faute commise par les architectes et une société d'étude en faisant procéder à la réception définitive des travaux sans qu'aient été relevés les vices apparents dont ils étaient entachés. Responsabilité solidaire des architectes et de la société d'études. Responsabilité engagée pour moitié seulement en raison de l'imprudence grave commise par le maître de l'ouvrage en prononçant sans réserves la réception définitive de travaux dont il ne pouvait ignorer les défectuosités).