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Marché d'architecture et d'ingénierie conclu selon la procédure de marché négocié sur la base des dispositions de l'article 312 bis du code des marchés publics. Dès lors que l'absence de mise en concurrence des architectes chargés de mettre en oeuvre le projet ne reposait sur aucune des justifications prévues par les dispositions de l'article 312 bis, et sans qu'il soit besoin d'apprécier si le choix sans mise en concurrence préalable de la société ayant conçu le procédé utilisé pouvait se justifier, le marché ainsi irrégulièrement conclu est entaché de nullité. En raison de sa nullité, un tel contrat n'a pu faire naître d'obligations entre les parties. Le décompte définitif résultant du solde de sa résiliation n'a pu ainsi produire effet et l'ordre de versement émis par l'administration à l'encontre de son cocontractant sur la base de ce décompte doit être annulé. L'administration ne peut davantage être condamnée à indemniser son co-contractant du préjudice subi par lui du fait du manquement de cette dernière à des obligations contractuelles.
https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000008078063/
Résumé
La nullité d'un marché public irrégulièrement passé fait obstacle à l'exécution des obligations contractuelles.
Dans cette décision du 28 juillet 2000, le Conseil d'État vient préciser les conséquences radicales de l'irrégularité de la procédure de passation d'un marché public sur son exécution et sa résiliation. L'apport majeur réside dans l'affirmation que la nullité du contrat fait obstacle à la naissance même d'obligations entre les parties, rendant ainsi inopérantes toutes les mesures d'exécution ultérieures.
Le litige concernait un marché d'architecture et d'ingénierie conclu en 1985 par un Office HLM pour la construction de logements, selon la procédure négociée prévue à l'article 312 bis du code des marchés publics alors en vigueur (désormais articles L2122-1 et R2122-1 et suivants du code de la commande publique).
Si le choix direct de la société détentrice du brevet du procédé technique pouvait éventuellement se justifier, le Conseil d'État relève que "l'absence de mise en concurrence des architectes chargés de mettre en œuvre le projet ne reposait sur aucune des justifications prévues". Cette irrégularité substantielle entache le marché de nullité, moyen que la Cour administrative d'appel aurait dû soulever d'office.
Le Conseil d'État en tire deux conséquences majeures :
1) Le marché étant nul, il n'a pu faire naître aucune obligation entre les parties. Dès lors, le décompte de résiliation établi par le maître d'ouvrage est privé de base légale, tout comme l'état exécutoire émis pour en obtenir le paiement. Le juge prononce donc leur annulation.
2) La nullité fait également obstacle à toute demande indemnitaire fondée sur la responsabilité contractuelle. Le Conseil rejette ainsi la demande du groupement de maîtrise d'œuvre visant à obtenir réparation du préjudice subi du fait des manquements allégués du maître d'ouvrage à ses obligations contractuelles.
Cette décision illustre la rigueur avec laquelle le juge administratif sanctionne le non-respect des règles de mise en concurrence, considérées comme d'ordre public. Les conséquences sont particulièrement sévères puisque la nullité :
- Prive rétroactivement d'effet toutes les mesures d'exécution du contrat
- Fait obstacle à toute indemnisation sur le terrain contractuel
- Doit être relevée d'office par le juge
La solution retenue renforce ainsi considérablement l'effectivité des règles de passation des marchés publics, même si elle peut sembler rigoureuse pour les opérateurs économiques de bonne foi.
Texte
[...]Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le marché d'architecture et d'ingénierie a été conclu selon la procédure de marché négocié sur la base des dispositions de l'article 312 bis du code des marchés publics, aussi bien s'agissant du choix des deux architectes que de celui de la SA Phenol Engineering, titulaire du brevet du procédé Samovar ; que, et sans qu'il soit besoin d'apprécier si le choix sans mise en concurrence préalable de la SA Phenol Engineering pouvait se justifier, l'absence de mise en concurrence des architectes chargés de mettre en oeuvre le projet ne reposait sur aucune des justifications prévues par les dispositions de l'article 312 bis du code des marchés publics ; qu'il appartenait dès lors à la cour administrative d'appel de Nancy de soulever d'office le moyen tiré de la nullité du marché ainsi irrégulièrement passé ; qu'en s'abstenant de le faire, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'une erreur de droit ; que M. JACQUIER est fondé à en demander l'annulation ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut "régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie" ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le marché d'architecture et d'ingénierie conclu entre l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Morez et le groupement de maîtrise d'oeuvre représenté par M. JACQUIER le 23 août 1985, était entaché de nullité ; qu'il y a lieu de constater cette nullité ; qu'en raison de sa nullité, ledit marché n'a pu faire naître d'obligations à la charge des parties ;
Considérant, en premier lieu, que le marché devant être regardé comme n'ayant jamais été conclu, le décompte définitif résultant du solde de sa résiliation d'un montant de 7 406 029,26 F, adressé le 22 mars 1993 par l'Office public d'aménagement et de construction du Jura n'a pu produire effet ; que l'ordre de versement émis par l'Office public d'aménagement et de construction du Jura sur la base de ce décompte doit être annulé ; que M. JACQUIER est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que par l'article 1er de son jugement rendu le 24 novembre 1994 le tribunal administratif de Besançon a rejeté l'opposition à l'état exécutoire émis par l'Office public d'aménagement et de construction du département du Jura pour un montant de 7 406 029,26 F correspondant au solde du marché de maîtrise d'oeuvre résultant du décompte définitif de résiliation qui a été adressé à l'intéressé le 22 mars 1993 ; qu'il y a lieu par suite d'annuler tant l'article 1er du jugement que l'état exécutoire ;
Considérant, en deuxième lieu, que pour les motifs ci-dessus indiqués tirés de la nullité du marché, M. JACQUIER, agissant au nom du groupement de maîtrise d'oeuvre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le même jugement du tribunal administratif a, par son article 5, rejeté sa demande tendant à ce que l'Office public d'aménagement et de construction du Jura soit condamné à indemniser ledit groupement du préjudice subi par lui du fait du manquement de cet établissement public à des obligations contractuelles ;
[...]MAJ 10/02/2001 - Source legifrance
Jurisprudence
CAA Paris, 11 décembre 2018, n° 17PA01588, Société Steam France (Protection de droits d’exclusivité et certificat d’exclusivité dans les marchés négociés sans publicité ni mise en concurrence. Certificat d'exclusivité : un document insuffisant pour justifier une procédure dérogatoire La Cour administrative d'appel de Paris précise, dans cette décision, les exigences en matière de preuve des droits exclusifs justifiant une dérogation aux principes de publicité et de mise en concurrence, tout en veillant à préserver la continuité du service public hospitalier).
CJCE, 14 septembre 2004, Commission c/République italienne, aff. C-385/02 (En recourant à la procédure négociée sans publication préalable d’un avis de marché, alors même que les conditions nécessaires à cet égard n’étaient pas réunies, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent).
Actualités
Marchés négociés sans publicité ni mise en concurrence et certificat d’exclusivité. (CAA Paris, 11 décembre 2018, n° 17PA01588, Société Steam France) - 29 décembre 2018.