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Le Tribunal rappelle qu'un acheteur ne peut attribuer un marché à un candidat qui ne respecte pas les exigences du règlement de consultation, particulièrement celles relatives au contenu du mémoire technique. Lorsque l'offre retenue est irrégulière au regard de ces exigences, la procédure doit être annulée si cette irrégularité a lésé les intérêts d'un concurrent évincé. En l'espèce, le Tribunal annule une procédure de marché public de location de structures temporaires. La société retenue , n'avait pas respecté les exigences du cadre de la réponse technique qui imposait de détailler précisément les moyens humains et matériels, ainsi qu'un planning d'exécution intégrant des contraintes horaires strictes pour l'installation et la désinstallation des équipements. Cette irrégularité a causé un préjudice à la société classée en seconde position, justifiant l'annulation de la procédure au stade de l'analyse des offres. Voir également : CE, 18 octobre 2024, n° 474772 (Mémoire technique incomplet entrainant le rejet de l'offre. L'absence de détails sur des éléments exigés) - TA Paris, 5 janvier 2024, n° 2328772 (Mémoire technique trop général et donc insuffisamment précis et spécifique).
https://opendata.justice-administrative.fr/recherche/shareFile/TA13/DTA_2505789_20250613
Résumé
La commune d'Aubagne avait lancé un marché de location de structures temporaires pour ses manifestations. Le cadre de la réponse technique, pièce contractuelle selon l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières, imposait aux candidats de détailler précisément leurs moyens humains et matériels, ainsi qu'un planning d'exécution intégrant des contraintes horaires strictes pour l'installation et la désinstallation des équipements.
Malgré ces exigences clairement formulées, la société SMM events, retenue par la commune, n'avait pas exposé dans son mémoire technique les éléments de méthode et d'organisation requis.
Le tribunal administratif de Marseille était saisi par la société Provence location, classée en seconde position, qui contestait l'attribution du marché en invoquant notamment l'irrégularité de l'offre de son concurrent. Dans sa décision, le juge des référés précontractuels rappelle les principes fondamentaux qui régissent l'analyse des offres dans les marchés publics.
Aux termes des articles L2152-1 et L2152-2 du code de la commande publique, l'acheteur doit écarter les offres irrégulières, c'est-à-dire celles qui ne respectent pas les exigences formulées dans les documents de la consultation. Cette obligation découle du principe fondamental selon lequel le règlement de consultation prévu par un pouvoir adjudicateur est obligatoire dans toutes ses mentions.
Comme l'a rappelé le tribunal, l'acheteur ne peut attribuer un marché à un candidat qui ne respecte pas une des exigences imposées par le règlement, sauf si cette exigence se révèle manifestement dépourvue de toute utilité pour l'examen des offres. Cette jurisprudence constante vise à garantir l'égalité de traitement entre les candidats et la transparence des procédures.
En l'espèce, le tribunal souligne que la seule mention portée sur le modèle de cadre de la réponse technique selon laquelle son utilisation était « vivement recommandée » ne pouvait être comprise que comme dispensant les candidats d'utiliser le document lui-même, mais non pas comme les dispensant de répondre aux exigences techniques formulées par ce cadre.
Le cadre de la réponse technique imposait aux candidats des obligations particulièrement détaillées au titre du sous-critère relatif à l'adéquation des moyens humains. Les candidats devaient notamment détailler précisément les moyens humains affectés à l'événement « argilla », incluant le nombre de techniciens, l'encadrement et les qualifications, les moyens matériels mis à disposition, les véhicules et équipements logistiques déployés sur site.
De plus, ils devaient proposer un planning détaillé d'exécution intégrant des contraintes temporelles strictes : installation et désinstallation en moins de deux heures de deux cents parasols sur un périmètre étendu, montage et démontage d'un chapiteau de 10m x 20m en deux jours maximum pour l'installation et un jour maximum pour le démontage, installation et démontage de cinq à dix barnums en moins de deux heures. Le règlement exigeait que les candidats détaillent « les différentes phases d'intervention, la méthodologie employée et l'organisation des équipes pour respecter ces contraintes horaires strictes ».
Ces exigences traduisent la volonté de l'acheteur de s'assurer de la capacité technique des candidats à exécuter des prestations complexes dans des délais contraints, éléments essentiels pour l'organisation d'évènements publics.
Le tribunal constate que « le mémoire technique présenté par la société SMM events n'exposant pas les éléments de méthode et d'organisation ainsi exigés par le cadre de la réponse technique, son offre était irrégulière et aurait donc dû être écartée par la commune d'Aubagne ». Cette appréciation reflète le contrôle effectué par le juge sur le respect des exigences techniques formulées dans les documents de consultation.
L'irrégularité constatée a directement lésé les intérêts de la société Provence location, classée en seconde position derrière la société SMM events et qui « aurait ainsi pu être attributaire du marché en cause ». Cette condition de préjudice est importante pour justifier l'annulation de la procédure. Le juge établit ainsi un lien direct entre l'irrégularité de l'offre retenue et le préjudice subi par le concurrent évincé.
Cette décision rappelle que les acheteurs ne peuvent faire preuve de souplesse dans l'application de leur règlement de consultation lorsque celui-ci formule des exigences précises et utiles à l'évaluation des offres.
La décision s'inscrit dans la continuité de la jurisprudence du Conseil d'État qui considère que l'acheteur peut s'affranchir des exigences du règlement de consultation uniquement quand l'irrégularité est à la fois formelle et dénuée de toute portée, ou que la fourniture des éléments demandés ne présente pas d'utilité pour l'appréciation des offres. Tel n'était manifestement pas le cas en l'espèce, où les exigences relatives au planning d'exécution et à l'organisation des équipes revêtaient une importance particulière pour l'évaluation de la capacité des candidats.
Les entreprises candidates doivent porter une attention particulière au respect intégral des exigences du règlement de consultation, en particulier celles relatives au mémoire technique. Elles ne peuvent se contenter d'une réponse générale mais doivent détailler précisément tous les éléments demandés, notamment les aspects méthodologiques et organisationnels dès lors qu'ils sont exigés.
Il est recommandé aux entreprises de vérifier systématiquement que leur offre répond point par point aux exigences techniques formulées, en particulier lorsque celles-ci concernent des contraintes opérationnelles spécifiques comme les délais d'installation ou les moyens humains et matériels. En cas de doute sur l'interprétation d'une exigence, il convient de demander des précisions pendant la phase de questions-réponses.
Texte
[...]
6. Il résulte du paragraphe 5 du règlement de la consultation, relatif à la présentation des candidatures et des offres, que l'offre présentée par les candidats devait comporter, outre l'acte d'engagement, le bordereau des prix unitaires et le détail quantitatif estimatif, le cadre de la réponse technique, celui-ci constituant une pièce contractuelle en application de l'article 2 du cahier des clauses administratives particulières. Dès lors, la seule mention portée sur le modèle de cadre de la réponse technique selon laquelle son utilisation était vivement recommandée ne pouvait être comprise que comme dispensant les candidats d'utiliser le document lui-même, et non pas comme dispensant les candidats de répondre aux exigences techniques formulés par le cadre de la réponse technique.
7. Le cadre de la réponse technique exigeait des candidats, au titre du sous-critère n°1 relatif à l'adéquation des moyens humaines, qu'ils détaillent précisément les moyens humains affectés à l'événement " argilla " (nombre de techniciens, encadrement, qualification), les moyens matériels mis à disposition pour l'ensemble des structures demandées, les véhicules et équipements logistiques déployés sur site et qu'ils proposent un planning détaillé d'exécution, intégrant les contraintes relatives à l'installation et la désinstallation en moins de deux heures de deux cents parasols sur un périmètre étendu, au montage et démontage d'un chapiteau de 10m x 20m comprenant un plancher lesté, une cloison de fond, un pont scénique, un éclairage pour mise en valeur, devant être installé en deux jours maximum et démonté en un jour maximum, à l'installation et au démontage de cinq à dix barnums (3x3m ou 4x4m) en moins de deux heures, les candidats devant détailler les différentes phases d'intervention, la méthodologie employée et l'organisation des équipes pour respecter ces contraintes horaires strictes.
8. Le mémoire technique présenté par la société SMM events n'exposant pas les éléments de méthode et d'organisation ainsi exigés par le cadre de la réponse technique, son offre était irrégulière et aurait donc dû être écartée par la commune d'Aubagne. Cette irrégularité a lésé les intérêts de la société Provence location, classée en seconde position derrière la société SMM events et qui aurait ainsi pu être attributaire du marché en cause. Il en résulte que la procédure de passation de ce marché doit être annulée au stade de l'analyse des offres, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens.
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MAJ 18/07/25
Actualités
Liens hypertextes dans les mémoires techniques des marchés publics : Quels sont les risques ? (Un soumissionnaire a l’obligation de soumettre son offre dans le délai imparti, au-delà de ce délai, celle-ci ne peut plus être modifiée. Mais qu’en est-il si certains éléments du mémoire technique sont accessibles uniquement par des liens hypertextes intégrés dans l’offre ? Le pouvoir adjudicateur a-t-il alors la garantie que ces éléments ne peuvent plus être modifiés après le délai de dépôt des offres ? Ces questions, liées à la réponse électronique, se sont posées dans un litige opposant un soumissionnaire dont l’offre a été rejetée et la Commission Européenne TUE, 14 juin 2023, Aff. n° T-376/21, Instituto Cervantes / Commission Européenne).
Jurisprudence marchés publics et autres contrats publics
CE, 18 octobre 2024, n° 474772 (Mémoire technique incomplet entrainant le rejet de l'offre. L'absence de détails sur des éléments exigés constituait une violation du règlement de la consultation. Le Conseil d'État examine la portée de l'insuffisante précision des moyens matériels décrits dans l'offre technique, en confirmant la qualification d'irrégulière d'une offre dont la description a été jugée insuffisante. En l'espèce, dans le cadre d'une procédure adaptée, l'offre retenue pour un marché de fourniture et renouvellement de matériau filtrant a été censurée car elle ne décrivait pas avec suffisamment de précision les équipements dédiés au chantier, notamment concernant le système de pompage).