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CE, 15 avril 2005, n°273178, Ville de Paris c/ Société SITA

Conseil d’Etat, 15 avril 2005, n°273178, Ville de Paris c/ Société SITA

Cette décision s'inscrit dans une jurisprudence constante du Conseil d'État exigeant une grande rigueur dans la rédaction des documents de la consultation par les pouvoirs adjudicateurs, afin de garantir une information claire et cohérente pour tous les candidats potentiels.

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000008226094/

La VILLE DE PARIS avait, publié au Journal officiel de l'Union européenne, le 6 avril 2004, un avis d'appel public à la concurrence qui indiquait : durée du marché ou délai d'exécution : à compter du 5 août 2004 - jusqu'au 21 octobre 2005, alors que le règlement de consultation du marché à son point 3-4 ainsi que l'acte d'engagement précisaient que la durée du marché était comprise entre sa date de notification et le 21 octobre 2005, la date du 5 août 2004 devenant, dans le règlement, celle, prévisionnelle, de notification du marché ;

Les informations ainsi données aux candidats sur les dates d'exécution du marché étaient contradictoires, dès lors notamment que la VILLE DE PARIS n'avait pas précisé dans l'avis d'appel public à la concurrence publié au Journal officiel de l'Union européenne, comme elle en avait la possibilité, que la date de début d'exécution revêtait un caractère seulement prévisionnel ; qu'en jugeant que cette contradiction, qui ne permettait aux candidats de connaître avec une précision suffisante ni la date de début, ni la durée d'exécution du marché - la seule mention, dans l'avis d'appel public à la concurrence, selon laquelle le marché de collecte relatif à l'arrondissement en cause était déjà attribué mais en attente de résolution devant le tribunal, sans indication, au surplus, de la date d'échéance d'un tel marché, n'étant pas de nature à les éclairer -, était constitutive d'un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à la VILLE DE PARIS, le magistrat délégué n'a pas commis d'erreur de droit

Contexte et procédure

La Ville de Paris a lancé une procédure de passation d'un marché public pour la collecte des déchets ménagers dans le 10ème arrondissement. La société SITA Ile-de-France Paris a contesté cette procédure devant le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Paris, qui a annulé la procédure. La Ville de Paris s'est pourvue en cassation devant le Conseil d'État contre cette ordonnance.

Cadre juridique

Le Conseil d'État rappelle le cadre juridique applicable :

  • L'article L551-1 du code de justice administrative relatif au référé précontractuel
  • L'article 40 du code des marchés publics concernant les obligations de publicité pour les marchés de fournitures et services des collectivités territoriales d'un montant supérieur à 230 000 euros

Problème juridique principal

La contradiction entre les informations fournies dans l'avis d'appel public à la concurrence et celles du règlement de consultation concernant la durée et les dates d'exécution du marché constitue-t-elle un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence ?

Raisonnement du Conseil d'État

Le Conseil d'État relève plusieurs éléments :

Contradiction dans les dates d'exécution

- L'avis d'appel public à la concurrence indiquait : "Durée du marché ou délai d'exécution : à compter du 5 août 2004 - jusqu'au 21 octobre 2005"

- Le règlement de consultation et l'acte d'engagement précisaient que la durée du marché était comprise entre sa date de notification et le 21 octobre 2005, le 5 août 2004 étant une date prévisionnelle de notification

Absence de précision sur le caractère prévisionnel

Le Conseil d'État note que "la VILLE DE PARIS n'avait pas précisé dans l'avis d'appel public à la concurrence publié au Journal officiel de l'Union européenne, comme elle en avait la possibilité, que la date de début d'exécution revêtait un caractère seulement prévisionnel".

Insuffisance d'information

Le Conseil d'État juge que cette contradiction "ne permettait aux candidats de connaître avec une précision suffisante ni la date de début, ni la durée d'exécution du marché".

Solution retenue

Le Conseil d'État confirme l'ordonnance du juge des référés précontractuels et juge que la contradiction dans les informations fournies "était constitutive d'un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à la VILLE DE PARIS".

Portée de la décision

Cette décision souligne l'importance de la cohérence et de la précision des informations fournies aux candidats dans les différents documents de la consultation.

Elle impose aux pouvoirs adjudicateurs une obligation de vigilance dans la rédaction de ces documents, sous peine de voir la procédure de passation annulée.

[...)

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés précontractuels que, par un jugement en date du 18 mars 2003, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 20 juillet 2004, devenu définitif, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision de la commission d'appel d'offres de la VILLE DE PARIS du 18 juillet 2002 retenant l'offre de la société SITA Ile-de-France Paris pour un lot, portant sur le 10ème arrondissement de Paris, d'un marché relatif à la collecte quotidienne des déchets ménagers, ainsi que la décision du maire de Paris de signer le marché correspondant ; qu'en exécution de ce jugement, la VILLE DE PARIS a demandé au même tribunal la résolution du marché en cause, conclu avec la société SITA Ile-de-France Paris jusqu'au 22 octobre 2005, et, en prévision de cette résolution, a engagé la procédure de passation, pour la durée restant à courir jusqu'à cette date, d'un nouveau marché de même objet ; que, toutefois, la procédure de passation de ce nouveau marché ayant été annulée par une ordonnance du juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Paris du 9 octobre 2003, devenue définitive après le rejet, par une décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux du 2 juin 2004, du pourvoi en cassation formé à son encontre par la VILLE DE PARIS, cette dernière a engagé, de nouveau, la procédure de passation d'un marché pour le même lot ; que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cette dernière procédure par une ordonnance du 11 octobre 2004 à l'encontre de laquelle la VILLE DE PARIS se pourvoit en cassation ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de justice administrative : Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics, des contrats de partenariat, des contrats visés au premier alinéa de l'article L. 6148-5 du code de la santé publique et des conventions de délégation de service public. / Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par ce manquement (...)./ Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la conclusion du contrat. Il peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l'exécution de toute décision qui s'y rapporte (...). / Le président du tribunal administratif ou son délégué statue en premier et dernier ressort en la forme des référés.

Considérant qu'en vertu de l'article 40 du code des marchés publics, pour les marchés de fournitures et de services des collectivités territoriales d'un montant supérieur à 230 000 euros, la personne publique est tenue de publier un avis d'appel public à la concurrence au Bulletin officiel des annonces des marchés publics et au Journal officiel de l'Union européenne, ces avis devant être établis conformément à des modèles fixés par arrêté du ministre chargé de l'économie ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés précontractuels que, en vue de la passation du marché objet du litige, la VILLE DE PARIS a, en application de ces dispositions, publié au Journal officiel de l'Union européenne, le 6 avril 2004, un avis d'appel public à la concurrence qui indiquait : Durée du marché ou délai d'exécution : à compter du 5 août 2004 - jusqu'au 21 octobre 2005, alors que le règlement de consultation du marché à son point 3-4 ainsi que l'acte d'engagement précisaient que la durée du marché était comprise entre sa date de notification et le 21 octobre 2005, la date du 5 août 2004 devenant, dans le règlement, celle, prévisionnelle, de notification du marché ;

Considérant que c'est sans dénaturer les pièces du dossier que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a pu estimer que les informations ainsi données aux candidats sur les dates d'exécution du marché étaient contradictoires, dès lors notamment que la VILLE DE PARIS n'avait pas précisé dans l'avis d'appel public à la concurrence publié au Journal officiel de l'Union européenne, comme elle en avait la possibilité, que la date de début d'exécution revêtait un caractère seulement prévisionnel ; qu'en jugeant que cette contradiction, qui ne permettait aux candidats de connaître avec une précision suffisante ni la date de début, ni la durée d'exécution du marché - la seule mention, dans l'avis d'appel public à la concurrence, selon laquelle le marché de collecte relatif à l'arrondissement en cause était déjà attribué mais en attente de résolution devant le tribunal, sans indication, au surplus, de la date d'échéance d'un tel marché, n'étant pas de nature à les éclairer -, était constitutive d'un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence incombant à la VILLE DE PARIS, le magistrat délégué n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la VILLE DE PARIS n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée, qui est suffisamment motivée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société SITA Ile-de-France Paris, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la VILLE DE PARIS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application des mêmes dispositions et de mettre à la charge de la VILLE DE PARIS une somme de 3 000 euros au titre des frais de même nature exposés par la société SITA Ile-France Paris ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la VILLE DE PARIS est rejetée.

Article 2 : La VILLE DE PARIS versera une somme de 3 000 euros à la société SITA Ile-de-France Paris en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

[...]

Jurisprudence

CE, 18 juillet 2024, n° 492938, association Nayma (Obligation de vigilance des opérateurs économiques face aux contradictions dans les documents de la consultation. Contradiction qui "était aisément décelable par les candidats qui ne pouvaient se méprendre de bonne foi sur les exigences du pouvoir adjudicateur telles qu'elles étaient formulées dans le règlement de la consultation, auquel ils devaient se conformer". Le Conseil d'État confirme l’irrégularité de l’offre de NAYMA qui ne pouvait soutenir que l’acheteur avait manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence en écartant ses offres comme irrégulières. Il s'agissait d'offres irrégulières car elles portaient sur plus de deux lots, en violation de l'article 1.4 du règlement de la consultation. Signature prématurée du contrat par l’acheteur en violation de l'obligation de respect du délai de suspension).

Textes

article L551-1 du code de justice administrative