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Sources des marchés publics > Jurisprudence
Résumé
Le conseil de Paris avait, par délibération du 19 décembre 2007, autorisé la signature par le maire d’un avenant au marché du 27 février 2007.
Cet avenant prévoyait le déploiement d’un nombre maximum de trois cents stations supplémentaires dans une bande de 1 500 mètres de large autour de Paris et la mise à disposition des 4 500 vélos correspondant à ces stations nouvelles en complément des 20 600 prévus dans le cadre de la première étape.
Cette extension était conforme aux stipulations du marché prévoyant une extension possible du nombre de vélos mis à disposition, extension susceptible d’entraîner un surcoût par rapport au prix initial du marché de 8 % au maximum.
L’article 20 du code des marchés publics, dans sa rédaction issue du décret du 1er août 2006 définit les conditions de recours à un avenant : « Sauf sujétions techniques imprévues ne résultant pas du fait des parties, un avenant ou une décision de poursuivre ne peut bouleverser l’économie du marché ou de l’accord-cadre, ni en changer l’objet. »
Le Conseil d’Etat considère que cette extension :
- n’a pas pour effet de bouleverser l’économie du marché initial ;
- n’a pas non plus pour effet d’en changer l’objet ;
Cette extension remplit dès lors les conditions fixées par l’article 20 précité du code des marchés publics et ne saurait, par suite, constituer un marché nouveau, distinct du contrat initial.
Texte
Conseil d’État
N° 312354
Publié au recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Stirn, président
M. Denis Prieur, rapporteur
M. Boulouis Nicolas, commissaire du gouvernement
FOUSSARD ; SCP BOULLOCHE, avocat(s)
lecture du vendredi 11 juillet 2008
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 janvier et 11
février 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la
VILLE DE PARIS, représentée par son maire en exercice ; la VILLE DE PARIS
demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’ordonnance du 2 janvier 2008 par laquelle le juge des
référés du tribunal administratif de Paris a, sur la requête de la société Clear
Channel France tendant, sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de
justice administrative, d’une part à ce qu’il soit enjoint à la ville de Paris
de différer la signature de l’avenant n° 1 au marché n° 0761001 jusqu’au terme
de la procédure et pour une durée maximale de vingt jours, d’autre part à
l’annulation de la procédure d’attribution portant sur la conclusion d’un
avenant par la ville de Paris avec la société Somupi au marché du 27 février
2007 relatif à la mise en place d’une flotte de vélos à destination du public et
de mobilier urbain d’information à caractère général ou local et accessoirement
publicitaire, et, enfin, à la condamnation de la ville de Paris à adresser aux
maires des communes concernées par le projet d’avenant l’ordonnance à intervenir
sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, annulé la délibération DVD 268
adoptée le 19 décembre 2007 par le conseil de Paris autorisant le maire de Paris
à signer un avenant n° 1 au marché n° 0761001 signé le 27 février 2007 avec
l’entreprise Somupi et à signer des conventions avec d’autres communes,
conformes à une convention-cadre annexée à ladite délibération et rejeté le
surplus des conclusions de la requête ;
2°) statuant en référé, de rejeter la demande présentée par la société
Clear Channel France devant le tribunal administratif de Paris ;
3°) de mettre à la charge de la société Clear Channel France le
versement d’une somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de
justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 2006-975 du 1er août 2006 portant code des marchés
publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Denis Prieur, Conseiller d’Etat,
- les observations de Me Foussard, avocat de la VILLE DE PARIS et de la
SCP Boulloche, avocat de la société Société Clear Channel France,
- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la VILLE DE PARIS a passé, le 27 février 2007, un marché avec
la société Somupi pour la mise en place d’un système de vélos en libre-service
dénommé « Vélib’ » ; que le marché prévoyait la mise à disposition de 20 600
vélos disponibles dans 1 451 stations ; qu’il prévoyait également la possibilité
de compléter significativement le nombre de stations de vélos et de vélos, par
bons de commandes, « en fonction des volumes mis en place dans la première
étape, du succès du dispositif, de l’évolution de la demande des usagers ou
encore de la nécessaire densification de certains quartiers » ; que par une
délibération du 19 décembre 2007, le conseil de Paris a autorisé le maire à
conclure un avenant à ce marché et à signer des conventions avec les communes
limitrophes en vue de l’installation, sur le territoire de ces communes, de
nouvelles stations « Vélib’ », afin d’élargir le service rendu aux usagers en
accroissant le nombre de vélos disponibles ainsi que l’aire de fonctionnement du
système ; qu’ayant eu connaissance de ce projet, la société Clear Channel
France, dont la candidature à l’attribution du marché de mise en place du
système n’avait pas été retenue, a, dès le 13 décembre 2007, sur le fondement
des dispositions de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, saisi
le juge des référés du tribunal administratif de Paris de conclusions tendant à
l’annulation de la procédure d’attribution portant sur la conclusion par la
ville d’un avenant au marché signé le 27 février 2007 avec la société Somupi ;
que par ordonnance du 2 janvier 2008, le juge des référés du tribunal
administratif de Paris a annulé la délibération du 19 décembre 2007 du conseil
de Paris ; que la VILLE DE PARIS se pourvoit en cassation contre cette
ordonnance ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 551-1 du code de justice
administrative : « Le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu’il
délègue, peut être saisi en cas de manquement aux obligations de publicité et de
mise en concurrence auxquelles est soumise la passation des marchés publics
(...) / Les personnes habilitées à agir sont celles qui ont un intérêt à
conclure le contrat et qui sont susceptibles d’être lésées par ce manquement
(...) / Le président du tribunal administratif peut être saisi avant la
conclusion du contrat. Il peut ordonner à l’auteur du manquement de se conformer
à ses obligations et suspendre la passation du contrat ou l’exécution de toute
décision qui s’y rapporte. Il peut également annuler ces décisions et supprimer
les clauses ou prescriptions destinées à figurer dans le contrat et qui
méconnaissent lesdites obligations (...) » ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant qu’aux termes de l’article 20 du code des marchés publics, dans sa rédaction issue du décret du 1er août 2006 : « Sauf sujétions techniques imprévues ne résultant pas du fait des parties, un avenant ou une décision de poursuivre ne peut bouleverser l’économie du marché ou de l’accord-cadre, ni en changer l’objet. » ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge du référé précontractuel du tribunal administratif de Paris que l’objet de l’avenant que le conseil de Paris a, par sa délibération du 19 décembre 2007, autorisé le maire à signer avec la société Somupi, est l’extension du service parisien de vélos en libre-service mis en place par le marché conclu le 27 février 2007 avec la même société ; que cette extension, conçue comme un complément du réseau parisien, porte sur l’implantation de stations supplémentaires uniquement sur la partie du territoire d’une trentaine de communes limitrophes ou très voisines de Paris comprise à l’intérieur d’une couronne de 1 500 mètres de largeur ; qu’en raison de l’identité de nature entre la prestation prévue par le marché initial et la prestation supplémentaire ainsi proposée aux usagers du système parisien « Vélib’ », de la portée limitée de ce complément, et dès lors qu’il ne s’agit que d’une extension réduite du service public parisien de vélos en libre service sur une largeur de 1 500 mètres autour de la ville, afin d’améliorer un service rendu essentiellement aux usagers qui habitent à Paris ou qui s’y rendent et non de mettre en place un service distinct destiné aux déplacements dans les communes limitrophes, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a inexactement qualifié l’avenant en jugeant qu’il avait pour effet de modifier l’objet du marché et qu’il constituait ainsi un nouveau marché ; qu’il résulte de ce qui précède que la VILLE DE PARIS est fondée à demander l’annulation de l’ordonnance du 2 janvier 2008 ;
Considérant que dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, en application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au titre de la procédure de référé engagée ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction que l’avenant au marché du 27 février 2007 dont le conseil de Paris a, par délibération du 19 décembre 2007, autorisé la signature par le maire, a prévu le déploiement d’un nombre maximum de trois cents stations supplémentaires dans une bande de 1 500 mètres de large autour de Paris et la mise à disposition des 4 500 vélos correspondant à ces stations nouvelles en complément des 20 600 prévus dans le cadre de la première étape, conformément aux stipulations de ce marché prévoyant une extension possible du nombre de vélos mis à disposition, financée par la ville sur son budget ; que cette extension était susceptible d’entraîner un surcoût par rapport au prix initial du marché de 8 % au maximum ; qu’ainsi cet avenant n’a pas pour effet de bouleverser l’économie du marché initial ; qu’ainsi qu’il vient d’être dit, il n’a pas non plus pour effet d’en changer l’objet ; qu’il remplit dès lors les conditions fixées par l’article 20 précité du code des marchés publics et ne saurait, par suite, constituer un marché nouveau, distinct du contrat initial ;
Considérant qu’il n’entre pas dans la compétence du juge du référé
précontractuel, telle qu’elle est définie par l’article L. 551-1 précité du code
de justice administrative, de statuer sur un avenant, dès lors que la conclusion
d’un tel accord n’est pas soumise aux règles de publicité et de concurrence qui
s’appliquent à la passation des marchés publics ; qu’ainsi la demande présentée
par la société Clear Channel France devant le tribunal administratif de Paris à
fin d’annulation de la procédure d’attribution de l’avenant contesté est
irrecevable et doit, par suite, être rejetée ; qu’il en va de même de ses
conclusions à fin d’injonction ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de
l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Clear Channel France le versement à la VILLE DE PARIS d’une somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge de la VILLE DE PARIS, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
DECIDE
Article 1er : L’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif
de Paris du 2 janvier 2008 est annulée.
Article 2 : La demande de la société Clear Channel France devant le
tribunal administratif de Paris et ses conclusions devant le Conseil d’Etat
tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative
sont rejetées.
Article 3 : La société Clear Channel France versera à la VILLE DE PARIS
la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice
administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la VILLE DE PARIS et à
la société Clear Channel France.
Jurisprudence
Conseil d’État, 11 juillet 2008, n° 312354, Ville de PARIS c/ société Clear Channel France (avenant à un marché public - Conditions. L’extension du périmètre d’un marché, dès lors que son extension par avenant n’a pas pour effet de bouleverser l’économie du marché initial ni changer l’objet du marché ne saurait, par suite, constituer un marché nouveau, distinct du contrat initial)
TA de Strasbourg, n° 0502612, 20 juin 2006, M. Mathern c./commune de Wahlenheim (Les avenants des marchés sans formalités préalables (marchés à procédure adaptée) sont dispensés de l'avis de la commission d'appel d'offres)
CE, 30 juillet 2003, n° 223445, Commune de LENS (ne peuvent être regardées comme des sujétions techniques imprévues au sens de ces dispositions, que des difficultés matérielles rencontrées lors de l'exécution d'un marché, présentant un caractère exceptionnel, imprévisibles lors de la conclusion du contrat et dont la cause est extérieure aux parties)
(c) F. Makowski 2001/2019