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jurisprudence CJCE, 16 octobre 2003, affaire C-421/01, Traunfellner GmbH

CJCE, 16 octobre 2003, affaire C-421/01, Traunfellner GmbH c/ Österreichische Autobahnen- und Schnellstraßen-Finanzierungs-AG (Asfinag)

ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

16 octobre 2003(1)

Dans l'affaire C-421/01,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par le Bundesvergabeamt (Autriche) et tendant à obtenir, dans le cadre du litige pendant devant cette juridiction entre

Traunfellner GmbH

et

Österreichische Autobahnen- und Schnellstraßen-Finanzierungs-AG (Asfinag) ,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de la directive 93/37/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux (JO L 199, p. 54),

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. J.-P. Puissochet, président de chambre, MM. R. Schintgen et V. Skouris (rapporteur), Mme F. Macken et M. J. N. Cunha Rodrigues, juges,

avocat général: M. S. Alber,


greffier: Mme M.-F. Contet, administrateur principal

considérant les observations écrites présentées:

- pour Traunfellner GmbH, par Me M. Oppitz, Rechtsanwalt,

- pour Österreichische Autobahnen- und Schnellstraßen-Finanzierungs-AG (Asfinag), par MM. O. Sturm et F. Lückler, en qualité d'agents,

- pour le gouvernement autrichien, par M. M. Fruhmann, en qualité d'agent,

- pour le gouvernement français, par MM. G. de Bergues et S. Pailler, en qualité d'agents,

pour la Commission des Communautés européennes, par M. M. Nolin, en qualité d'agent, assisté de Me R. Roniger, Rechtsanwalt,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales du gouvernement autrichien et de la Commission à l'audience du 6 mars 2003,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 10 avril 2003,

rend le présent

Arrêt

1.

Par ordonnance du 25 septembre 2001, parvenue à la Cour le 21 octobre suivant, le Bundesvergabeamt a posé, en application de l'article 234 CE, cinq questions préjudicielles sur l'interprétation des articles 19, premier et deuxième alinéas, et 30, paragraphes 1 et 2, de la directive 93/37/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux (JO L 199, p. 54, ci-après la «directive»).

2.

Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant la société Traunfellner GmbH à la société Österreichische Autobahnen-und Schnellstraßen-Finanzierungs-AG (ci-après l'«Asfinag») au sujet du rejet d'une offre présentée par Traunfellner dans le cadre d'un marché public de travaux.

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

3.

L'article 19 de la directive dispose:

«Lorsque le critère d'attribution du marché est celui de l'offre économiquement la plus avantageuse, les pouvoirs adjudicateurs peuvent prendre en considération les variantes présentées par des soumissionnaires lorsqu'elles satisfont aux exigences minimales requises par ces pouvoirs adjudicateurs.

Les pouvoirs adjudicateurs mentionnent, dans le cahier des charges, les conditions minimales que les variantes doivent respecter ainsi que les modalités de leur soumission. Ils indiquent, dans l'avis de marché, si les variantes ne sont pas autorisées.

Les pouvoirs adjudicateurs ne peuvent rejeter la soumission d'une variante pour la seule raison qu'elle a été établie avec des spécifications techniques définies par référence à des normes nationales transposant des normes européennes, ou à des agréments techniques européens ou à des spécifications techniques communes visées à l'article 10, paragraphe 2, ou encore par référence à des spécifications techniques nationales visées à l'article 10, paragraphe 5 points a) et b).»

4.

L'article 30 de la directive prévoit:

«1. Les critères sur lesquels le pouvoir adjudicateur se fonde pour attribuer les marchés sont:

a) soit uniquement le prix le plus bas;

b) soit, lorsque l'attribution se fait à l'offre économiquement la plus avantageuse, divers critères variables suivant le marché en question: par exemple le prix, le délai d'exécution, le coût d'utilisation, la rentabilité, la valeur technique.

2. Dans le cas visé au paragraphe 1 point b), le pouvoir adjudicateur mentionne, dans le cahier des charges, ou dans l'avis de marché, tous les critères d'attribution dont il prévoit l'utilisation, si possible dans l'ordre décroissant de l'importance qui leur est attribuée. [.]»

La législation nationale

5.

La directive a été transposée en droit autrichien par le Bundesgesetz über die Vergabe von Aufträgen (Bundesvergabegesetz) 1997 (loi fédérale de 1997 sur la passation des marchés publics, BGBl. I, 1997/56, ci-après le «BVergG»).

6.

L'article 42 du BVergG énonce:

«(1) Dans la mesure où la procédure de négociation n'entre pas en application, le soumissionnaire doit se conformer à l'appel d'offres pour l'établissement de l'offre. Le texte prescrit par le cahier des charges ne peut être ni modifié ni complété.

[...]

(4) Une offre alternative n'est recevable que si elle garantit la fourniture d'une prestation qualitativement équivalente. La preuve de l'équivalence incombe au soumissionnaire. Une offre alternative peut porter sur l'ensemble de la prestation, sur des parties de celle-ci ou sur les conditions juridiques de la fourniture de la prestation. Les offres alternatives doivent être désignées comme telles et présentées sous forme distincte.

[...]»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

7.

Le 27 novembre 1997, la division chargée de la construction des routes fédérales de l'administration du gouvernement du Land de Basse-Autriche, placée sous l'autorité du gouverneur de ce Land et agissant au nom et sur instructions de l'Asfinag, a publié à l'échelle communautaire un appel d'offres portant sur le marché des travaux de réfection du tronçon routier «Neumarkt chaussée direction Vienne, km 100, 2 à 108,6» de l'autoroute de l'ouest A 1. Le marché avait pour objet les travaux de construction de ponts et de routes.

8.

En ce qui concerne l'exécution du revêtement de la route, en dehors des ponts autoroutiers, l'appel d'offres spécifiait sous l'intitulé «Projet officiel», sans qu'il s'agisse expressément d'une exigence minimale, qu'il y avait lieu de réaliser un revêtement en béton à deux couches en qualité de béton supérieur.

9.

L'appel d'offres mentionnait que les offres alternatives étaient autorisées, sans établir de spécifications techniques expresses quant aux exigences minimales techniques de ces offres alternatives. Il était simplement spécifié que celles-ci ne seraient retenues qu'accompagnées d'un bordereau complet de prestations conforme à l'appel d'offres (offre principale).

10.

Il n'avait pas été spécifié de critères d'attribution pour l'appréciation de la qualité économique et technique des offres que ce soit pour les offres conformes à l'appel d'offres ou pour les offres alternatives. L'appel d'offres ne précisait pas davantage que les offres alternatives devaient garantir une fourniture de prestations équivalant au modèle officiel et le contenu de la notion de «fourniture de prestation équivalente» n'avait pas été précisé. Le cahier des charges se bornait à renvoyer à l'article 42 du BVergG.

11.

Traunfellner a établi une offre alternative à un prix total de 78 327 748,53 ATS. Cette offre était la moins chère de toutes les offres. Toutefois, la moins chère des offres conformes à l'appel d'offres, c'est-à-dire au projet officiel, a été établie par le groupement de soumissionnaires Ilbau - LSH Fischer - Heilit & Woerner, à un prix total de 87 750 304,3 ATS.

12.

Dans son offre alternative, Traunfellner prévoyait, au lieu du revêtement en béton prévu dans l'appel d'offres, un revêtement en asphalte réalisé à partir de matériaux à base de bitume.

13.

Le 17 février 1998, la division chargée de la construction des routes fédérales a demandé à Traunfellner des explications concernant la qualité technique de son offre alternative. À la suite de la production par Traunfellner des documents et précisions demandés, la division chargée de la construction des routes fédérales de l'administration du gouvernement du Land de Basse-Autriche a élaboré un rapport de contrôle technique dans lequel il était énoncé que les expériences acquises à l'occasion de marchés antérieurs avaient montré que, malgré l'exécution soigneuse et conforme au marché d'une telle construction en asphalte, des ornières d'une profondeur non négligeable étaient apparues après une brève période, engendrant des travaux de réhabilitation supplémentaires.

14.

Selon ledit rapport de contrôle, l'exécution de la réfection générale de la route en béton conformément à l'appel d'offres officiel devait être préférée, en tout cas eu égard à la longévité (30 ans contre 20 ans pour le revêtement en asphalte) et à la résistance à la déformation de ce mode de construction. En particulier, dans le cas d'un revêtement en béton, une longévité augmentée de 50 % n'entraînerait que 8,5 % de surcoût. En conséquence, l'offre alternative de Traunfellner ne devait pas être considérée comme équivalant aux exigences du projet officiel et devait donc être rejetée.

15.

Sur le fondement de ce rapport, la commission de passation des marchés instituée au sein de la division chargée de la construction des routes fédérales a décidé, le 17 mars 1998, de proposer l'attribution du marché au groupement de soumissionnaires Ilbau - LSH Fischer - Heilit & Woerner.

16.

Le 17 avril 1998, Traunfellner a demandé au Bundesvergabeamt de déclarer nulle et non avenue la décision du pouvoir adjudicateur de rejeter son offre alternative.

17.

Le 21 avril 1998, le Bundesvergabeamt a rejeté la demande de Traunfellner au motif essentiel que la question de l'éventuelle équivalence technique de l'offre alternative de cette société était dépourvue de pertinence. Selon le Bundesvergabeamt, cette «offre alternative» s'écartait en effet des prescriptions de l'appel d'offres dans une telle mesure qu'il ne s'agissait plus d'une offre alternative éventuellement recevable et qu'elle devait être rejetée en tout état de cause. En outre, même s'il s'agissait d'une offre alternative recevable, elle ne serait pas techniquement équivalente et elle ne devrait pas, dès lors, être prise en considération.

18.

Le 3 juin 1998, Traunfellner a formé un recours contre la décision du Bundesvergabeamt du 21 avril 1998 devant le Verfassungsgerichtshof (Cour constitutionnelle) (Autriche). Ce dernier a, par un arrêt du 27 novembre 2000, fait droit au recours de Traunfellner et a annulé ladite décision pour violation du droit à l'égalité devant la loi, garanti par le droit constitutionnel. Tel serait notamment le cas lorsqu'une autorité motive sa décision par des énonciations n'ayant pas valeur de motivation. Il en aurait été ainsi dans la présente affaire, le Bundesvergabeamt ayant omis d'indiquer les motifs étayant sa constatation qu'il n'y avait pas d'«offre alternative».

19.

Selon le droit autrichien, le Bundesvergabeamt est tenu de statuer de nouveau sur la demande de Traunfellner du 17 avril 1998. Cependant, ainsi qu'il est précisé dans l'ordonnance de renvoi, le marché ayant déjà été attribué «une déclaration de nullité de la décision attaquée du pouvoir adjudicateur n'est plus possible», le Bundesvergabeamt n'étant plus appelé, conformément au BVergG, que pour constater s'il y a eu violation du droit et, en conséquence, si la décision du pouvoir adjudicateur d'écarter de l'évaluation l'offre alternative de Traunfellner était légale.

20.

C'est dans le cadre de ce second examen que le Bundesvergabeamt a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) L'offre alternative d'un soumissionnaire consistant à proposer au lieu de la réalisation du revêtement de la chaussée en béton, faisant l'objet de l'appel d'offres, un revêtement en asphalte constitue-t-elle une variante' au sens de l'article 19, premier alinéa, de la directive 93/37/CEE?

2) Le critère établi par des dispositions nationales pour la possibilité de retenir une variante' au sens de l'article 19, premier alinéa, de la directive 93/37/CEE, selon lequel l'offre alternative garantit la fourniture d'une prestation qualitativement équivalente', peut-il être légalement considéré comme une exigence minimale' requise et mentionnée par le pouvoir adjudicateur conformément à l'article 19, premier et deuxième alinéas, de la directive 93/37/CEE lorsque le cahier des charges se borne à renvoyer à la disposition nationale et ne précise pas davantage sur la base de quels paramètres de comparaison concrets s'apprécie l'équivalence'?

3) L'article 30, paragraphes 1 et 2, de la directive 93/37/CEE, en combinaison avec les principes de transparence et d'égalité de traitement interdit-il au pouvoir adjudicateur de subordonner l'acceptation d'une offre alternative qui se distingue par une autre qualité technique d'une offre conforme à l'appel d'offres à une appréciation favorable sur la base d'un critère établi dans des dispositions nationales selon lequel l'offre alternative garantit la fourniture d'une prestation qualitativement équivalente' lorsque le cahier des charges se borne à cet égard à renvoyer à la disposition nationale et ne précise pas davantage sur la base de quels paramètres de comparaison concrets s'apprécie l'équivalence'?

4) a) En cas de réponse affirmative à la troisième question, un pouvoir adjudicateur peut-il mener à son terme une procédure de passation de marché telle que celle décrite dans la troisième question, en attribuant le marché?

b) En cas de réponse affirmative à la troisième question et à la quatrième question, sous a), un pouvoir adjudicateur qui met en oeuvre une procédure de passation de marché telle que celle visée à la troisième question doit-il rejeter, sans examen au fond, les variantes proposées par certains soumissionnaires, du moins lorsqu'il n'a pas fixé de critères d'attribution pour l'appréciation des différences techniques de la variante par rapport à l'appel d'offres?

5) En cas de réponse affirmative à la troisième question et à la quatrième question, sous a), et de réponse négative à la quatrième question sous b), un pouvoir adjudicateur qui met en .uvre une procédure de passation de marché telle que celle visée à la troisième question doit-il retenir une variante dont il ne peut apprécier les différences techniques par rapport à l'appel d'offres à l'aide de critères d'attribution, faute de spécifications correspondantes dans l'appel d'offres, lorsque cette variante constitue l'offre la moins chère et qu'il n'a pas été fixé par ailleurs de critères d'attribution?»

Sur la première question

21.

Il convient de rappeler que, en vertu de l'article 234 CE, fondé sur une nette séparation des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour, celle-ci est uniquement habilitée à se prononcer sur l'interprétation ou la validité d'un texte communautaire, à partir des faits qui lui sont indiqués par la juridiction nationale et que, en revanche, il appartient à cette dernière d'appliquer les règles de droit communautaire à un cas concret. En effet, une telle application ne peut être effectuée sans une appréciation des faits de l'affaire dans leur ensemble (voir arrêt du 18 novembre 1999, Teckal, C-107/98, Rec. p. I-8121, points 29 et 31). Par conséquent, la Cour n'est pas compétente pour trancher les faits au principal ou pour appliquer à des mesures ou à des situations nationales les règles communautaires dont elle a donné l'interprétation, ces questions relevant de la compétence exclusive de la juridiction nationale (voir arrêt du 22 juin 2000, Fornasar e.a., C-318/98, Rec. p. I-4785, point 32).

22.

En l'espèce, par sa première question, le Bundesvergabeamt ne vise pas à obtenir de la Cour une interprétation de l'article 19 de la directive afin de pouvoir apprécier par la suite si l'offre présentée par Traunfellner constitue une variante au sens de cette disposition, mais il invite la Cour à procéder elle-même à cette appréciation.

23.

Une telle démarche amènerait toutefois la Cour à appliquer elle-même la disposition communautaire susmentionnée au litige dont le Bundesvergabeamt est saisi, tâche qui, conformément à la jurisprudence citée au point 21 du présent arrêt, échappe à la compétence dont la Cour est investie dans le cadre de l'article 234 CE.

24.

Il découle de ce qui précède que la Cour n'est pas compétente pour répondre à la première question.

Sur la deuxième question

25.

Par cette question, la juridiction de renvoi vise en substance à savoir si l'article 19 de la directive doit être interprété en ce sens qu'il est satisfait à l'exigence tenant à la mention des conditions minimales requises par un pouvoir adjudicateur pour prendre en considération les variantes lorsque le cahier des charges se borne à renvoyer à une disposition de la législation nationale, selon laquelle l'offre alternative garantit la fourniture d'une prestation qualitativement équivalente par rapport à celle faisant l'objet de l'appel d'offres, sans préciser davantage les paramètres de comparaison concrets sur le fondement desquels s'apprécie cette équivalence.

26.

Il ressort du dossier que la disposition de la législation nationale visée dans la deuxième question est l'article 42, paragraphe 4, du BVergG et que l'expression «offre alternative» qui y est employée correspond au terme «variante» utilisé à l'article 19 de la directive.

27.

Ceci étant, il résulte du libellé même de l'article 19, deuxième alinéa, de la directive que lorsqu'un pouvoir adjudicateur n'a pas exclu la présentation de variantes, il est tenu de mentionner dans le cahier des charges les conditions minimales que celles-ci doivent respecter.

28.

Par conséquent, le renvoi opéré par le cahier des charges à une disposition de la législation nationale ne saurait satisfaire à l'obligation prévue à l'article 19, deuxième alinéa, de la directive (voir, par analogie, pour ce qui concerne le renvoi opéré à une disposition de la législation nationale en vue de définir les critères d'attribution d'un marché public de travaux à l'offre économiquement la plus avantageuse, arrêts du 20 septembre 1988, Beentjes, 31/87, Rec. p. 4635, point 35, et du 26 septembre 2000, Commission/France, C-225/98, Rec. p. I-7445, point 73).

29.

En effet, seule une mention dans le cahier des charges permet aux soumissionnaires d'être tenus informés de la même manière sur les conditions minimales que doivent respecter leurs variantes pour qu'elles puissent être prises en considération par le pouvoir adjudicateur. Il s'agit en fait d'une obligation de transparence visant à garantir le respect du principe d'égalité de traitement des soumissionnaires auquel doit obéir toute procédure de passation de marché régie par la directive (voir, en ce sens, pour ce qui concerne les critères d'attribution, arrêt du 18 octobre 2001, SIAC Construction, C-19/00, Rec. p. I-7725, points 41 et 42).

30.

Au vu des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la deuxième question que l'article 19 de la directive doit être interprété en ce sens qu'il n'est pas satisfait à l'exigence tenant à la mention des conditions minimales requises par un pouvoir adjudicateur pour prendre en considération les variantes, lorsque le cahier des charges se borne à renvoyer à une disposition de la législation nationale, selon laquelle l'offre alternative garantit la fourniture d'une prestation qualitativement équivalente par rapport à celle faisant l'objet de l'appel d'offres.

Sur la troisième question

31.

En vue de répondre à cette question, il convient d'opérer une distinction entre les conditions minimales visées à l'article 19 de la directive et les critères d'attribution visés à l'article 30 de celle-ci. En effet, l'article 19 vise les conditions dans lesquelles des variantes peuvent être prises en considération par les pouvoirs adjudicateurs alors que l'article 30, en énumérant les critères d'attribution permis, concerne un stade ultérieur de la procédure de passation de marché. Dès lors, l'article 30 ne peut s'appliquer qu'aux variantes qui ont été valablement prises en considération en conformité avec l'article 19.

32.

Or, il ressort des points 27 et 30 du présent arrêt que la prise en considération des variantes au sens de l'article 19 de la directive est subordonnée à l'indication, dans le cahier des charges, des conditions minimales que ces variantes doivent respecter et qu'un simple renvoi par le cahier des charges à une disposition de la législation nationale n'est pas suffisant pour remplir cette exigence.

33.

Il s'ensuit que, si le pouvoir adjudicateur n'a pas observé les exigences fixées à l'article 19 de la directive en ce qui concerne l'indication des conditions minimales, une variante ne peut pas être prise en considération, même si les variantes n'ont pas été déclarées irrecevables dans l'avis de marché, comme prévu au deuxième alinéa dudit article 19.

34.

Il convient donc de répondre à la troisième question en ce sens que l'article 30 de la directive ne peut s'appliquer qu'aux variantes qui ont été valablement prises en considération par le pouvoir adjudicateur, conformément à l'article 19 de la directive.

Sur les quatrième et cinquième questions

35.

Par ces questions, qui ne sont posées que dans l'hypothèse où une réponse affirmative serait apportée à la troisième question, la juridiction de renvoi souhaite être éclairée sur l'incidence qu'auraient les irrégularités commises en ce qui concerne l'évaluation des variantes sur le déroulement ultérieur de la procédure de passation de marché. En particulier, la juridiction de renvoi demande si, en cas de telles irrégularités, le pouvoir adjudicateur peut mener à son terme la procédure de passation concernée en attribuant le marché [quatrième question, sous a)] et, en cas de réponse affirmative à cette question, si le pouvoir adjudicateur doit rejeter, sans examen au fond, les variantes proposées, compte tenu de la non-fixation de critères d'attribution pour l'appréciation des différences techniques de la variante par rapport à la prestation faisant l'objet de l'appel d'offres [quatrième question, sous b)] ou bien s'il doit retenir la variante lorsque celle-ci constitue l'offre la moins chère (cinquième question).

36.

La défenderesse au principal estime qu'il y a lieu de considérer comme irrecevable la quatrième question, sous a), celle-ci n'ayant aucun rapport avec la réalité du litige au principal. Pour le même motif, et en soulignant les compétences limitées dont jouit la juridiction de renvoi en vertu du BVergG après l'attribution du marché (voir point 19 du présent arrêt), le gouvernement autrichien estime, pour sa part, que la Cour doit déclarer irrecevables la quatrième question, sous a) et b), ainsi que la cinquième question.

37.

Il convient de rappeler à cet égard que, conformément à une jurisprudence constante, dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales instituée par l'article 234 CE, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d'apprécier, au regard des particularités de l'affaire, tant la nécessité d'une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu'il pose à la Cour. Le refus de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n'est possible que lorsqu'il apparaît de manière manifeste que l'interprétation du droit communautaire sollicitée n'a aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (voir, notamment, arrêt du 12 juillet 2001, Ordine degli Architetti e.a., C-399/98, Rec. p. I-5409, point 41).

38.

En l'espèce, il ressort du dossier que la procédure de passation de marché concernée a déjà été menée à son terme, que le marché a déjà été attribué et que la procédure devant la juridiction de renvoi ne concerne pas la légalité de la décision d'attribution mais bien la légalité de la décision par laquelle le pouvoir adjudicateur a rejeté l'offre alternative de Traunfellner. La question de savoir si ladite procédure s'est déroulée de manière régulière après cette dernière décision ne fait donc pas l'objet du litige dont est saisie la juridiction de renvoi. Or, les quatrième et cinquième questions se rapportent précisément à cette partie de la procédure de passation de marché.

39.

Il s'ensuit que ces questions doivent être considérées comme étant de nature hypothétique et donc déclarées irrecevables.

Sur les dépens

40.

Les frais exposés par les gouvernements français et autrichien, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Par ces motifs,

LA COUR (sixième chambre),

statuant sur les questions à elle soumises par le Bundesvergabeamt, par ordonnance du 25 septembre 2001, dit pour droit:

1) L'article 19 de la directive 93/37/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, doit être interprété en ce sens qu'il n'est pas satisfait à l'exigence tenant à la mention des conditions minimales requises par un pouvoir adjudicateur pour prendre en considération les variantes, lorsque le cahier des charges se borne à renvoyer à une disposition de la législation nationale, selon laquelle l'offre alternative garantit la fourniture d'une prestation qualitativement équivalente par rapport à celle faisant l'objet de l'appel d'offres.

2) L'article 30 de la directive 93/37 ne peut s'appliquer qu'aux variantes qui ont été valablement prises en considération par le pouvoir adjudicateur, conformément à l'article 19 de cette directive.

Puissochet

Schintgen

Skouris

Macken

Cunha Rodrigues

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 octobre 2003.

Le greffier

Le président de la sixième chambre

R. Grass

V. Skouris  

Source : http://curia.europa.eu/

Voir les conclusions de l'avocat général

Jurisprudences :

CJCE, 16 octobre 2003, affaire C-421/01, Traunfellner GmbH c/ Österreichische Autobahnen- und Schnellstraßen-Finanzierungs-AG (Asfinag) (Points 27 et 28 de l'arrêt : lorsqu'un pouvoir adjudicateur n'a pas exclu la présentation de variantes, il est tenu de mentionner dans le cahier des charges les conditions minimales que celles-ci doivent respecter. Par conséquent, le renvoi opéré par le cahier des charges à une disposition de la législation nationale ne saurait satisfaire à l'obligation prévue à l'article 19, deuxième alinéa, de la directive (voir, par analogie, pour ce qui concerne le renvoi opéré à une disposition de la législation nationale en vue de définir les critères d'attribution d'un marché public de travaux à l'offre économiquement la plus avantageuse, arrêts du 20 septembre 1988, Beentjes, 31/87, Rec. p. 4635, point 35, et du 26 septembre 2000, Commission/France, C-225/98, Rec. p. I-7445, point 73).

CAA Lyon, 11 octobre 2012, n° 11LY01982, SAS Faurie (Les variantes doivent être précises sur la nature ou l'étendue des variantes que le pouvoir adjudicataire se propose d'admettre et respecter les exigences de l'article 50 du code des marchés publics)

CAA Marseille 18 mai 2004, n° 00MA01077, Commune de Cannes. (La personne publique ne peut retenir une offre de base qui inclut des prestations supplémentaires non prévues dans le programme fonctionnel (cas notamment d'un appel d'offres sur performances).

CE, 29 janvier 2003, n°208096, DEPARTEMENT D'ILLE-ET-VILAINE (Une proposition technique qui, compte tenu de sa faible importance et des termes où elle a été formulée, ne saurait revêtir le caractère d'une variante par rapport à l'objet du marché)

CE, 7 novembre 2001, SA Quillery, no 218221 (Modalités de présentation des variantes et indemnisation de l'entreprise évincée irrégulièrement).

CE, 28 juillet 2000, Commune de Villefranche-de-Rouergue, n° 199549 (Une offre supplémentaire à l’offre de base, sans différence significative avec cette dernière ne peut être regardée comme une variante)

CAA Nantes, 23 février 2000, Sté Laiterie Saint Père, n° 97NT01218 (Conditions de prise en compte d'une variante)

CE, 28 juillet 1999, Institut français de recherche scientifique pour le développement en coopération (ORSTOM), n° 186051 et 186219 (Appréciation de la notion de variante - Distinction entre variante et solution de base)